Commission WSB, un bijou d’intelligence collective

De nombreux acteurs allemands de la société civile insistaient sur la nécessité de sortir du charbon pour que la Energiewende, stratégie menée par la chancelière Angela Merkel et son gouvernement de coalition CDU + SPD, puisse être pleinement crédible et conduise à un réel succès. Mais l’Allemagne était déjà engagée dans une vraie sortie du nucléaire depuis 2011. Alors y ajouter une sortie du charbon paraissait excessif aux partis de la coalition, aux filières industrielles électro-intensives et aux Länders comptant encore un vivier considérable d’emplois liés au charbon et au lignite.

La chancelière allemande et son gouvernement décident courant 2018 de mettre en place une Commission de 28 membres réunissant des experts issus des milieux économiques, des organisations environnementales, des syndicats, des initiatives citoyennes et des régions les plus impactées par une éventuelle sortie du charbon.

Cette Commission officiellement installée le 6 juin 2018 a pour nom : WSB – Wachstum, Strukturwandel und Beschäftigung – Croissance, mutations structurelles et emploi. A. Merkel, sceptique vis-à-vis de la sortie du charbon, leur demande de lui démontrer qu’il peut exister un vrai consensus autour de la faisabilité d’une telle perspective. Mais elle exige un travail complet : quel calendrier ? quelle trajectoire ? quels outils de financement ? quels impacts économiques et sociaux au plus près des bassins miniers et comment les compenser ? …

 

Traduction partielle (avec deepl.com) du chapitre 2.1 du rapport remis par la WSB en janvier 2019,

Parmi ce mandat figure l’élaboration d’un programme d’action dont les points forts sont les suivants :

  • création d’une perspective concrète pour de nouveaux emplois d’avenir dans les régions concernées, en coopération entre l’État fédéral, les Länder, les communes et les acteurs économiques (par exemple dans le domaine des infrastructures de transport, du développement de la main-d’œuvre qualifiée, du développement entrepreneurial, de l’implantation d’instituts de recherche, du développement structurel à long terme).
  • développement d’une combinaison d’instruments qui allie développement économique, changement structurel, compatibilité sociale, cohésion sociale et protection du climat, tout en ouvrant des perspectives viables pour les régions énergétiques dans le cadre de la transition énergétique.
  • cela comprend également les investissements nécessaires dans les régions et les secteurs économiques concernés par le changement structurel, pour lesquels les instruments de soutien existants de l’État fédéral et de l’UE sont utilisés de manière efficace, ciblée et prioritaire dans les régions concernées et pour lesquels un fonds pour le changement structurel est utilisé en complément, notamment avec des fonds de l’État fédéral.
  • des mesures qui permettent d’atteindre de manière fiable l’objectif de 2030 pour le secteur de l’énergie, y compris une analyse d’impact complète.
  • à ce propos il ressort du plan de lutte contre le changement climatique l’objectif de réduction des émissions du secteur de l’énergie de 61 à 62 % en 2030 par rapport à 1990. En ce qui concerne la contribution de la production d’électricité à partir de charbon, la Commission doit proposer des mesures appropriées pour atteindre l’objectif sectoriel 2030 du secteur de l’énergie, qui doivent être intégrées dans le programme de mesures 2030 pour la mise en œuvre du plan de lutte contre le changement climatique.
  • en outre, un plan de réduction et d’élimination progressives de la production d’électricité à partir du charbon, comprenant une date d’achèvement et les mesures d’accompagnement nécessaires sur le plan juridique, économique, social, de la renaturation et des politiques structurelles.
  • De même, des mesures concernant la contribution du secteur de l’énergie afin de réduire autant que possible l’écart par rapport à l’objectif de réduction de 40 %. À cet effet, le gouvernement fédéral publiera une estimation actualisée de l’ampleur de l’écart à prévoir dans le cadre du rapport 2017 sur la protection du climat.

Après d’intenses débats et la consultation de nombreux scientifiques et groupes d’intérêts, les 28 membres de la Commission « Croissance, changements structurels et emploi » (WSB) se sont mis d’accord sur une sortie de la production d’électricité à partir du charbon en Allemagne, qui offre aux personnes et aux entreprises concernées une sécurité de planification et des perspectives de développement durable après le charbon. Fin janvier 2019, la Commission WSB a remis son rapport final à la chancelière de la Confédération.

Le rapport final de la Commission WSB contient un grand nombre de recommandations en matière de politique structurelle et énergétique qui combinent la réduction progressive et l’élimination de l’énergie électrique au charbon et la réussite du développement structurel. Le 22 mai 2019, le gouvernement fédéral a adopté les grandes lignes de la mise en œuvre des propositions de la Commission WSB en matière de politique structurelle. Ce concept permet de faire en sorte que les territoires puissent évoluer vers des régions économiques et énergétiques modernes. Les points de référence prévoient que la Confédération met à disposition, d’ici 2038 au plus tard, un montant total de 40 milliards d’euros pour le développement des bassins de lignite existants. Les sites des centrales électriques au charbon particulièrement touchées et l’ancien bassin du Lignite d’Helmstedt recevront également un soutien.

L’ampleur de la réflexion conduite par la WSB et surtout la finesse de la trajectoire validée collectivement permettent le vote au cours du second semestre 2020 de la loi « Kohleausstiegsgesetz (réduction et fin de la production d’électricité à partir du charbon) ».

« Kohleausstiegsgesetz du 8 août 2020 (BGBl. I S. 1818), modifiée par l’article 3b de la loi du 3 décembre 2020 (BGBl. I, p. 2682) »

Gesetz zur Reduzierung und zur Beendigung der Kohleverstromung und zur Änderung weiterer Gesetze (Kohleausstiegsgesetz)

Loi sur la réduction et la fin de la production d’électricité à partir du charbon et sur la modification d’autres lois (loi sur la sortie du charbon)

Pour mesurer, comprendre et apprécier toute cette intelligence collective déployée, consultez la « feuille de route » de sortie du charbon d’ici à 2038. A souligner que les discussions encore en cours entre les membres de la nouvelle coalition conduite par le chancelier Olaf Scholz pourraient ambitionner une sortie définitive quelques années plus tôt.

Décroissance programmée, effective et irrésistible