L’éolien, une énergie évidemment décarbonée
Le graphique ci-dessous de l’Agence européenne de l’environnement l’illustre parfaitement : l’utilisation de l’énergie au sein de l’Union Européenne est bel et bien la source très majoritaire d’émissions de GES (Gaz à effet de serre) – environ 78%, même si entre 1990 et 2017 sa contribution a été significativement réduite de 22%.
L’anneau nous informe qu’en 2017 la production elle-même des diverses énergies pèse 1179 Mt CO2éq, soit 35% des 3368 Mt CO2éq émises pour l’utilisation de l’énergie.
Note : les différents Gaz à effet de serre (GES) sont CO2, CH4, N2O et gaz fluorés.
Selon un expert en pipi, « … à la fin de ces 500 Mds € d’investissement (éolien, solaire), les allemands produisent 8,6 fois plus de CO2 par kWh que la France … ». Phrase vociférée par Laurent ALEXANDRE (urologue, essayiste en cour au RN et fondateur de Doctissimo) sur France Inter le 17 février 2020. Mensonge, démonstration à suivre.
Oui la France émet grosso modo deux fois moins de GES que l’Allemagne, celle-ci ayant une population plus importante et une industrie bien plus développée. Oui la France a obtenu jusqu’à présent de bons scores parce qu’elle mise depuis maintenant un demi-siècle sur l’électricité nucléaire.
Et n’oublions tout de même pas que l’Allemagne actuelle est le fruit de la réunification à partir des années 1990 de la RFA (République fédérale d’Allemagne) et de la RDA (République démocratique d’Allemagne). Il s’agit d’un processus extrêmement long et complexe – peut-être pas encore correctement abouti, ce n’est pas l’objet bien entendu de cet article. Quoi qu’il en soit, sur le volet énergétique il faut bien comprendre qu’il a fallu composer (et encore aujourd’hui) avec une RDA très orientée lignite et houille (un peu comme la Pologne) et avec des infrastructures en piètre état.
Nous allons voir avec des ratios de comparaison exacts que depuis deux décennies l’Allemagne se désintoxique, se soigne, mais certainement pas en allant consulter un urologue.
Voici sur cette carte l’empreinte carbone moyenne par habitant de chacune des 177 régions de l’Union Européenne. Les données comprennent les émissions directes des ménages, telles que les émissions de gaz d’échappement des véhicules, et les émissions indirectes, telles que celles créées dans les chaînes d’approvisionnement des produits achetés, qui sont ensuite comptabilisées comme faisant partie intégrante de ce produit. Pour les régions allemandes l’empreinte oscille entre 12 et 14 tonnes de CO2éq par habitant, en France c’est entre 8 et 10.
Nul ne le conteste, l’Allemagne vient effectivement de loin concernant les émissions de gaz à effet de serre. Mais ces deux courbes montrent très clairement que la stratégie de réduction est en Allemagne terriblement plus intense et efficace. Quels ont été leurs leviers pour atteindre de si bons résultats ?
- des programmes d’efficacité énergétique tous azimuts,
- une sortie du charbon encore très timide lors de la 1ère décennie de ce siècle mais qui a connu deux accélérations, d’abord en 2011 en même temps que la décision de la chancelière Angela Merkel de sortir du nucléaire après Fukushima, puis en 2019 avec la planification négociée de sortie du charbon en 2038 (… et peut-être même dès 2030 selon la nouvelle coalition au pouvoir depuis fin 2021),
- un déploiement fort et sans faille des énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque) depuis deux décennies.
Quelle évolution entre 2011 (décision de sortir du nucléaire) et aujourd’hui constate-t-on ? Les résultats sont sans ambiguïté.
Crise économique de 2008, retour à la valeur 2007 en 2013 (totaux houille+lignite équivalents) puis très nette diminution des TWh produits par houille+lignite.
La sortie du nucléaire est véritablement enclenchée, et ce dès la décision de Angela Merkel en 2011 (l’arrêt sera total en 2022).
QUI REMPLACE nucléaire ET charbon ? Les RENOUVELABLES, n’en déplaise aux « Jancovichystes ».
On constate même sur ce premier graphique que le mouvement a été fortement accéléré à partir de 2011.
Pourtant M. Dominique SEUX, le chroniqueur économique de France Inter, prononce la sentence dramatique suivante le 22 janver 2020 : « … une étude publiée par les universités américaines de Berkeley et Santa Barbara montre que la décision précipitée de sortir du nucléaire après 2011 et de le remplacer immédiatement par du charbon, cette décision a causé la mort de 1.000 personnes chaque année chez nos voisins allemands … ». Désolé cher Dominique, la cause de ces 1000 décès annuels n’est pas à rechercher du côté du « remplacement immédiat par du charbon ». Ce sont les renouvelables qui ont remplacé à la fois le nucléaire et le charbon. Besoin d’un autre éclairage chiffré pour valider ce constat ? eh bien voici le graphique suivant.
Je précise que, pour faire de bonnes analyses, il faut au minimum avoir l’exigence d’aller directement à la source des bilans statistiques énergétiques de l’Allemagne depuis 1990 qui sont présentés par exemple dans le document suivant « The Energy Transition in the Power Sector : State of Affairs in 2019 – A review of major developments of 2019, and an outlook for 2020 » par AGORA ENERGIEWENDE – BERLIN, 6. JANUARY 2020. Le même état des lieux, mais à fin 2021 est disponible ici uniquement en langue allemande.
J’ajoute d’ailleurs que l’Agora EnergieWende est une plateforme de veille sur la EnergieWende (la Transiton énergétique allemande), réunissant des universitaires et des associations : leurs commentaires sont intéressants car, de façon générale, peu complaisants à l’égard du gouvernement fédéral, estimant plutôt qu’il pourrait faire mieux et plus fort, plus vrai.
Eloquent, n’est-ce pas ? le mythe entretenu du charbon qui remplacerait le nucléaire ne fait pas long feu.
Mercredi 2 février 2022 sur France Inter – L’Edito ECO – Ce jour-là Dominique Seux tient des propos cette fois plus précis, plus honnêtes : peut-être venait-il de lire tout le texte de cette page que j’avais mis en ligne quelques jours auparavant. Bon, je relève aussi par des liens internet dans son texte qu’il a consulté le site du Ministère allemand de l’Economie et de l’Energie.
« … La coalition allemande s’est fixée des objectifs très ambitieux, et l’Allemagne a montré, depuis 1990, qu’elle est capable de beaucoup plus d’efforts (et de résultats) que la France pour diminuer ses émissions de CO2.
Mais elle partait de beaucoup plus haut et elle reste, sur ce critère, beaucoup plus haut. Le 1er chiffre de cet édito : l’Allemagne a émis 760 millions de tonnes de CO2 en 2021, contre peut-être moins de 420 millions pour la France. Le nombre d’habitants est certes différent (20% d’écart), mais ce n’est pas loin d’un rapport de un à deux … »
En effet, s’il est vrai que quelques nouvelles centrales électriques au charbon ont été mises en fonction ces dernières années, elles ont permis d’arrêter des plus anciennes. Et comme les nouvelles sont beaucoup moins polluantes (je n’emploierai pas pour autant le terme « charbon propre »), vous constatez sur la diapo ci-dessous montrant les émissions de CO2 du secteur « Production électrique » que, après la quasi-stagnation entre 2010 (246 MtCO2) et 2015 (249 MtCO2), celles du couple lignite+houille chutent fortement ces dernières années (158 MtCO2 en 2019).
… et pour démontrer ce que respect des engagements signifie en Allemagne, cliquer ici à propos de sa sortie de l’énergie nucléaire | … et pour rassurer ceux qui veulent croire que les Allemands resteraient d’incorrigibles « gueules noires », cliquer ici |
Quant à la France …
Ci-dessus quelques graphiques et tableaux exposent la situation de la France en termes d’émissions de GES. Il est traditionnellement reproché par les anti-éoliens (ou pro-nucléaire, c’est à peu près la même engeance) que le développement des Enr ne permet pas réduire les émissions de gaz à effet de serre. Voici à suivre des extraits de « BILAN PRÉVISIONNEL de l’équilibre offre-demande d’électricité en France – ÉDITION 2019 – RTE » qui constate que ce reproche est infondé. Je rappelle que RTE-Réseau de Transport de l’Electricité est la structure nationale en charge du réseau Haute et Très Haute Tension.
« … Les études menées par RTE pour le Bilan prévisionnel 2019 ont notamment montré :
- que le développement des énergies renouvelables en France avait un effet baissier sur les émissions de CO2 en France et en Europe ;
- que les scénarios de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), ou les scénarios de type Volt et Ampère du Bilan prévisionnel 2017, conduisaient à une diminution des émissions de CO2 pour le système électrique en France mais également dans le reste de l’Europe.
Ces résultats peuvent parfois susciter l’incompréhension de certains commentateurs, qui interprètent les transformations du secteur électrique selon un unique prisme, celui d’une concurrence entre le nucléaire et les énergies renouvelables au niveau national.
Les analyses de RTE positionnent le développement des énergies renouvelables dans une perspective plus vaste, à double niveau :
(i) l’échelle du fonctionnement du système électrique (européenne et non nationale) et
(ii) le périmètre de prise en compte des émissions (pour lequel il faut intégrer les transferts d’usage prévus vers le secteur de l’électricité).
… Aujourd’hui, les énergies éolienne et solaire se déploient donc essentiellement en addition au potentiel de production nucléaire et hydraulique. … L’augmentation de la production éolienne et solaire en France se traduit ainsi par une réduction de l’utilisation des moyens de production thermique fossile … en France et dans les pays voisins, car le système électrique fonctionne de manière interconnectée à l’échelle européenne.
… D’où des émissions évitées par l’éolien et le solaire français estimées à 22 millions de tonnes par an en 2019, en France (5 millions) et dans les pays voisins (17 millions) … Ces résultats battent en brèche une vision réductrice du système électrique où chaque incrément de production éolienne et solaire se ferait au détriment du nucléaire et n’aurait pas d’influence sur les émissions de gaz à effet de serre
… À moyen terme, l’atteinte des objectifs publics de croissance de production décarbonée en France permettra de réduire encore les émissions de gaz à effet de serre, soit dans les pays voisins via la hausse des exports et le moindre recours aux centrales thermiques situées dans ces pays, soit en France via des transferts d’usages vers l’électricité … »
Au-delà des seules émissions de CO2 …
L’Analyse du Cycle de Vie (ACV) permet d’évaluer l’impact environnemental d’un produit en tenant compte de l’extraction et du traitement des matières premières, des processus de fabrication, du transport et de la distribution, de l’utilisation et de la réutilisation du produit fini, et finalement, du recyclage et de la gestion des déchets en fin de vie.
Voici les résultats des indicateurs évalués par l’étude « Impacts environnementaux de l’éolien français » menée par l’ADEME en 2015 et que je vous invite à consulter dans le détail.
Eolien terrestre |
Eolien en mer |
Mix élec France |
|
Taux d’émission GES (en g CO2éq / kWh) |
12,7 |
14,8 |
79 |
Temps de retour énergétique (en mois) |
12 |
14 |
60 |
Facteur de récolte |
19 |
17 |
|
Taux d’émission de particules (en g PM2,5éq) |
0,01 |
0,015 |
0,023 |
DEFINITIONS
Temps de retour énergétique : en combien de temps la turbine produit la quantité d’énergie qu’elle a consommée au cours de son cycle de vie.
Facteur de récolte : le nombre de fois que la turbine produit la quantité d’énergie qu’elle a consommée au cours de son cycle de vie.
PM2,5éq est l’unité de mesure des particules en suspension dans l’atmosphère, appelées également « particules fines », dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres.
Autres impacts mesurés pour cette ACV : sur l’acidification des sols et cours d’eau, sur la consommation d’eau, sur l’utilisation des sols, sur les flux de déchets (dangereux, radioactifs).
CONCLUSION … empruntée à SER et FEE
Comparée aux énergies fossiles et fissiles …
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