Quel est le coût complet du MWh éolien ?
Définition du LCOE pour un système de production électrique
Le Levelized Cost Of Electricity, ou coût de production dit « complet » correspond, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), à la valeur présente de la somme des coûts de production actualisés divisés par la production totale d’électricité ajustée à sa valeur temps économique. La formule de calcul du LCOE intègre l’ensemble des dépenses d’investissement réalisées, ainsi que les coûts d’exploitation et maintenance ayant lieu tout au long de la phase d’exploitation, avant de les actualiser puis de les ramener à un coût par mégawattheure, sur la base d’un productible actualisé également.
Dépenses d’investissements (ou capital expenditure – CAPEX) | Coûts d’exploitation et maintenance (ou operational expenditure – OPEX) |
Développement des projets éoliens (jusqu’à l’obtention des autorisations) Achat des éoliennes (ainsi que les coûts de transport et de montage) Travaux de génie civil (fondations, plateformes, chemin d’accès) Travaux de raccordement au réseau de transport de l’électricité Aléas de conduite de projet et de chantier | Suivi d’exploitation Maintenance au cours de la vingtaine d’années de production Taxes (CVAE, CFE, taxe foncière, IFER) Autres coûts : loyers, assurances, mesures compensatoires ou d’accompagnement, mesures ICPE de suivi d’exploitation, divers, … |
D’où en ordre de grandeur, un investissement (ou CAPEX) de 1350 k€/MW et des coûts d’exploitation et maintenance (OPEX) cumulés sur 20 ans de 1042 k€/MW.
Ainsi en avril 2014, le SER (Syndicat des Energies Renouvelables) calcule un LCOE de 85 €/MWh éolien produit, en considérant une durée de vie de 20 ans et un taux d’actualisation de 8%.
Selon une autre étude « Coûts des énergies renouvelables en France » publiée par l’ADEME en janvier 2017, en considérant une durée de vie de 20 ans et un taux d’actualisation de 5% :
- le LCOE est estimé entre 60 et 90 €/MWh pour un aérogénérateur standard nécessitant un investissement de 1300-1400 €/kW,
- le LCOE est estimé entre 55 et 80 €/MWh pour un aérogénérateur nouvelle génération nécessitant un investissement de 1400-1700 €/kW,
Note : considérant une éolienne dans son régime de fonctionnement moyen, si elle réussit à gagner 100 heures de production supplémentaires dans l’année alors son coût complet de production baisse de 3 €/MWh environ.
Une autre source d’informations chiffrées
Dans l’étude « Renouvellement de l’éolien – Quelles stratégies possibles et envisageables en fin d’exploitation pour les parcs éoliens terrestres ? » réalisée par l’ADEME en juillet 2020, le cabinet d’expertise éolienne EVEROZE communique les valeurs suivantes pour l’ensemble des coûts d’exploitation et maintenance (OPEX).
Les coûts de maintenance des éoliennes observés pour de nouvelles installations en contrat « full service » à long-terme sont en année 15 de l’ordre suivant
- Pour une machine de 1,0 à 1,9 MW, 30-40 k€ par an
- Pour une machine de 2,0 à 2,9 MW, 42-52 k€ par an
- Pour une machine de 3,0 à 3,9 MW, 55-70 k€ par an
Les autres coûts d’exploitation sont de l’ordre de 20-25 k€ par MW pour un parc moyen en France : il s’agit des coûts périodiques et ponctuels de maintenance pour le reste de l’installation, des coûts d’exploitation et de gestion (loyers, assurances, gestion technique, comptable et administratives, consommations, etc.), et des taxes (ces dernières pesant environ pour moitié).
Quant à l’énergie nucléaire …
Selon le rapport de la Cour des Comptes « Coût de production de l’électricité nucléaire – Actualisation Mai 2014 », le LCOE du MWh nucléaire « existant » (coût de production complet, démantèlement et retraitement inclus) s’établit entre 30 et 60 €/MWh. Mais les investissements de maintenance sur le parc existant, en particulier de sûreté, n’ont pas encore atteint leur maximum : travaux « après-Fukushima » exigés, dépenses liées au prolongement de la durée d’exploitation des centrales actuelles au-delà de 40 ans.
Qu’en sera-t-il des LCOE (coût « complet ») pour les capacités de production à mettre en service entre 2025 et 2035 ?
Selon une monographie de la CRE – Commission de Régulation de l’Energie faite en mai 2018, le coût du MWh éolien (idem pour le PV) à horizon 2030 s’établira autour de 50 €. Même en lui imputant une part des coûts d’infrastructures (telles que stockage, capacités, réseaux pour lesquels « … il n’y a pas péril en la demeure… ») le LCOE serait autour de 70 à 80 €/MWh. Lire à ce sujet les études techniques de RTE et par exemple la vulgarisation rédigée par MM. Grandjean et Quirion « La montée en puissance des énergies renouvelables électriques » en janvier 2020.
Quant au coût du MWh nucléaire « nouveau », celui fourni par l’EPR de Flamanville ne sera pas inférieur à 150 €, celui d’Hinkley Point ne sera pas inférieur à 110 €. Quelles que soient les évolutions des deux décennies à venir il ne sera pas inférieur à 80 €, mais probablement très supérieur comme nous met en garde la Cour des Comptes dans son rapport d’actualisation de mai 2014 : « … des dépenses futures qui restent caractérisées par quelques fortes incertitudes … Les charges brutes des dépenses futures liées à l’activité électronucléaire (87,2 Md€ en 2013, + 5,2 % en euros constants depuis 2010) regroupent trois types de dépenses, dont le chiffrage est encore soumis à beaucoup d’incertitude et dont l’évolution globale est en hausse … »
dessin saisi sur le blog d’Alain GRANDJEAN https://alaingrandjean.fr
CONCLUSION : Le MWh nucléaire va être plus cher de 0 à 50 € par rapport au MWh renouvelable (ou de 0 à 5 c€ par rapport au kWh renouvelable). Ce qui signifie que pour chaque tranche de 100 TWh, le nucléaire risque de nous coûter 5 Milliards € supplémentaire (rappel : nous consommons 550 TWh élec).
C’est à l’électricité nucléaire de démontrer qu’elle va savoir être compétitive dans les décennies à venir.
Quelques extraits de « La montée en puissance des énergies renouvelables électriques » en janvier 2020 :
« … Le coût direct du kWh éolien ou solaire était en 2010 très supérieur au coût du nucléaire. Son coût pour les investissements actuels est supérieur au coût du parc nucléaire existant voisin de 5 centimes ; mais la comparaison doit porter sur des réalisations nucléaires ou renouvelables vers 2030. Le coût au kWh d’un nouveau parc nucléaire ne sera pas inférieur à 8 centimes, et sera peut-être très supérieur. Le coût du kWh à Flamanville ne sera pas inférieur à 15 centimes et celui de l’EPR d’Hinkley Point au Royaume-Uni à 11 centimes. Pour des réalisations éoliennes et solaires vers 2030, un coût moyen de 5 centimes incluant le raccordement au réseau paraît une hypothèse raisonnable.
… Pour une comparaison €/kWh avec le nucléaire, ce coût est à majorer :
- de 10 % pour tenir compte de pertes par le stockage et d’excédents non stockés quelques centaines d’heures par an (l’option non nucléaire nécessite une production supplémentaire de 50 TWh).
- du coût des quelque 35 GW supplémentaires de capacités pilotables nécessaires. Leur coût annuel est de l’ordre de 100 Millions d’euros (M€) par gigawatt, donc 3,5 milliards d’euros par an pour 25 GW. Répartis sur une consommation totale de 630 TWh, c’est un peu plus d’un demi-centime par kWh – très loin de chiffrages souvent médiatisés parfois caricaturaux.
- du différentiel de coût dans les réseaux qui pourrait être de 1 à 2 centimes par kWh. Enedis et RTE accroissent en ce moment leurs investissements pour que le réseau puisse à horizon 2035 absorber 70 GW de renouvelables variables en plus, et 12 millions de points de recharge rapide des véhicules électriques. Les investissements additionnels totaux seront compris entre 1 et 2 milliards par an, soit bien inférieurs à 1 centime le kWh. Néanmoins les besoins croîtront sans doute encore pour un scénario à plusieurs centaines de GW. Il n’est pas facile de les estimer, nous nous contenterons ici d’une fourchette large. Notons que ces coûts sont financés par les développeurs via un mécanisme spécifique et donc inclus dans les prix soumis aux appels d’offre.
En définitive le coût total de l’option non nucléaire serait de l’ordre de 7 à 8 centimes, inférieur ou égal à celui de l’option nucléaire ; une différence de 0 à 5 centimes par KWh, soit pour 325 TWh, jusqu’à 16 milliards d’euros par an. Ce surcoût en défaveur du nucléaire n’est pas rédhibitoire, mais l’analyse rationnelle montre clairement que c’est au nucléaire neuf de faire ses preuves face aux énergies renouvelables et non l’inverse, contrairement à ce qui est souvent affirmé … »
Quel coût complet du MWh électrique à l’horizon 2050 ?
Dans le cadre son étude de décembre 2018 « Trajectoires d’évolution du mix électrique 2020-2060 », l’ADEME démontre que le coût complet de l’électricité produite par le mix en évolution, après une légère hausse en début de période, baisse de 8 % en 2050 par rapport à 2020. L’intégration des EnR a un coût, lié notamment à la nécessité de développer des capacités flexibles (stockage, maintien de capacités gaz…), du réseau (interconnexion, réseau de transport), ou aux pertes d’utilité (moindre utilisation du nucléaire restant), mais ce coût, croissant au cours du temps, est inférieur à l’économie réalisée grâce à la baisse progressive des coûts de production des EnR. Pour cette étude, la trajectoire de référence retenue pour l’évolution de notre mix électrique est telle qu’en 2050 la part des EnR est de 87 %.
L’augmentation progressive de la part de renouvelable permet de faire tendre le coût total de l’électricité facturée au consommateur vers 90 €/MWh hors taxes (à comparer à près de 100 €/MWh de coût actuel), ceci malgré l’augmentation prévisible du prix des énergies fossiles et du CO2. Par ailleurs, réduire la demande d’électricité (grâce à l’efficacité énergétique notamment) induirait une diminution des coûts totaux du système de 7% et des émissions de CO2 de 22% en 2060 tout en permettant une augmentation des exportations, par rapport à la trajectoire de référence.
Pour tenter de voir autrement, faisons appel à l’expertise économique des anti-éoliens.
Les multiples associations nationales ou parisiennes de la constellation friquée du lobby anti-éolien, liées les unes aux autres par une certaine consanguinité, sont animées par des hauts fonctionnaires, anciens ceci anciens cela, restés figés sur les cours qu’ils ont reçus au cours des années 60-70 dans leurs Grandes Ecoles.
Elles ont pour doux nom « collectif Energie Vérité », Fédération Vent de Colère, FED-Fédération Environnement Durable et donnent naissance à des associations plus locales, par le « Collectif des Contribuables de Haute-Marne » présidé par Jacques RICOUR (encore un ancien, pour lui c’était directeur régional de ANTEA-BRGM à Lille et à Nancy) et dont le trésorier Jean-Louis REMOUIT est membre d’Energie Vérité.
Voici une autre structure du même réseau, le GIRE Groupe indépendant de réflexion sur l’énergie. Par exemple le 1er janvier 2019 il adresse ses vœux sous forme de mise en garde.
Ouf ! ils ne nous laissent pas démunis face à ce constat implacable : ayant réponse à tout, voici (sur la colonne de droite) comment ils nous proposent de faire pour produire l’électricité dont nous avons besoin. Ne riez pas … par respect pour ces Anciens.
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